Dans un monde saturé d’images, de notifications et de “breaking news”, les médias occupent une place centrale dans notre rapport au réel. Ils façonnent nos représentations, sélectionnent ce qui mérite attention, ce qui doit alarmer, ce qui doit être oublié. Longtemps considérés comme des piliers de la démocratie et du savoir partagé, ils semblent aujourd’hui glisser, parfois malgré eux, vers une fonction beaucoup plus ambivalente.
La peur est devenue un ressort narratif courant. Crises sanitaires, conflits géopolitiques, violences sociales, effondrements climatiques… L’information, plutôt que de soutenir la pensée, finit par sidérer. Quand elle devient répétitive, dramatique et décontextualisée, elle ne permet plus de comprendre, mais seulement de réagir
D’un point de vue psychanalytique, cette saturation de peur réactive nos angoisses archaïques celles liées à l’insécurité, à la perte ou au danger imminent et maintient le sujet dans un état d’alerte permanent. À force d’être exposé à ces signaux de menace, le psychisme s’habitue à fonctionner dans un mode défensif : hypervigilance, repli, agitation ou au contraire inhibition. Cela déborde alors sur la vie quotidienne, altérant notre capacité de symbolisation, de recul et de désir.
Dans cet espace émotionnel saturé, beaucoup s’épuisent ou s’endurcissent.
Et cela n’est pas sans effet sur le psychisme.
Nous pouvons constater combien les effets de cette exposition constante sont délétères, en particulier chez les personnes déjà fragilisées psychologiquement. L’anxiété se renforce, les troubles du sommeil s’amplifient, et le sentiment d’impuissance s’enracine. Le sujet se sent cerné, incapable de se représenter un avenir, et parfois même indigne d’en désirer un.
Du point de vue psychanalytique, cette surcharge émotionnelle empêche le travail de symbolisation : les affects ne peuvent plus être élaborés, ils restent à l’état brut et envahissant. Le sujet n’a plus assez d’espace psychique pour transformer ce qu’il ressent en pensées, ce qui favorise la répétition des mêmes angoisses et conduit parfois à un effondrement narcissique. Les médias, en exacerbant des contenus menaçants, réactivent les zones les plus vulnérables du psychisme, rendant difficile toute mise à distance intérieure.
La marginalisation prend alors une autre forme, plus insidieuse : il ne s’agit plus seulement d’être exclu matériellement, mais de perdre progressivement sa place dans le langage commun. Quand les récits médiatiques ne donnent plus de place à la nuance, au doute, à la lenteur de la pensée, ils finissent par exclure ceux qui ne se conforment pas à la norme de la réaction immédiate.
Face à cela, que faire ?
Nous n’avons pas à renoncer aux médias, ni à nous enfermer dans la méfiance ou le silence. Mais il devient nécessaire d’apprendre à résister : résister à la séduction de la panique, à la logique de la peur, à la tentation de se couper de soi-même pour rester “dans le coup”.
Penser les médias, les questionner, les remettre à leur juste place, c’est déjà se réapproprier un espace intérieur. Un espace où la parole peut à nouveau circuler, se différencier, s’affranchir du diktat de l’immédiat. C’est aussi une manière de prendre soin individuellement et collectivement de notre santé mentale, de notre rapport au monde, et de notre désir d’y prendre part autrement.
Si vous vous reconnaissez dans ce que j’aborde et que vous souhaitez être accompagné, n’hésitez pas à me contacter. J’interviens sur Marquette-lez-Lille, Lambersart, Marcq-en-Barœul, La Madeleine et l’ensemble de la métropole lilloise.
